Moon Brothers, Sarah Crossan, traduit par Clémentine Beauvais, Rageot, 2019.
Pour Joe, Ed c’était son « frère, mais c’était aussi un genre de père et de meilleur ami ».
Si Joe part pour le Texas c’est pour retrouver ce frère qui est parti il y a longtemps. Il n’était alors qu’un petit garçon dans une famille sans père et quasiment sans mère.
Maintenant Edward Moon attend son exécution à moins que la cour d’Etat, la cour suprême et en dernier recours le gouverneur n’en décident autrement.
Joe raconte ses journées, ses rencontres au parloir avec ce frère à qui il ne sait pas quoi dire..
Joe se souvient de lui, si prévenant, qui l’emmenait à l’école et lui racontait des blagues.
Joe ne peut croire à la culpabilité de son frère.
« Ils ont coffré Ed pour le meurtre d’un flic,
un crime bien moche,
mais tous les criminels ne finissent pas sur la chaise,
électrique. »
Dans la touffeur du Texas Joe bricole une voiture en gage de quoi on lui fournit une chambre et de quoi manger.
Entre les parloirs et les souvenirs Joe redécouvre ce frère comme un « mec bien » et l’attente n’en devient que plus oppressante.
Et puis il y a Nell, une fille délurée qui prend de plus en plus de place « Je pense à Nell, son short, son T-shirt lâche, pas à Ed et à son jogging ».
De chapitre en chapitre le temps s’écoule et le gouffre se creuse entre la résignation de Ed et l’espoir mêlé de colère de Joe.
Le récit est à la première personne et le narrateur nous livre sans voile, ses impressions, ses souvenirs, ses émotions, ses désirs et ses défaites. Cela donne à ce livre une forme très particulière de chapitres très courts, le plus court étant celui-ci :
» Jour suivant
Pareil «
et des chapitres plus développés dont l’un des plus longs est sans doute le récit par Ed du périple qui lui valut de se retrouver en prison.
« Moon Brothers » ressemble ainsi à un journal intime où les personnages de sa sœur, sa mère, sa tante sont dévoilés progressivement au fil des souvenirs et l’histoire de Joe se construit comme un puzzle où le lecteur est très actif.
C’est bien sûr un plaidoyer contre la peine de mort pratiquée encore aux Etats Unis.
Coup de coeur pour Inséparables, par Anouk Gouzerh :
A découvrir, de la même autrice : Inséparables (éditions Rageot, 2017), l’histoire de Grace, sa rentrée au lycée, son premier amour, sa relation avec sa soeur Tippi, sa famille… une histoire classique, sauf que Grace et Tippi sont des « soeurs siamoises », aux tempéraments bien différents.
Le livre est, comme Moon Brothers, écrit en vers libres, et évite avec talent le voyeurisme, le pittoresque ; il explore toute la complexité des relations entre les personnages, et nous émeut fortement lorsqu’il exprime le sentiment de risque avec lequel les deux soeurs vivent, de santé fragile alors qu’elles commencent à s’ouvrir au monde.
Ces romans nous ont été présentés par les bibliothécaires de la médiathèque La Pléiade de Beaugency dans le cadre du club Book Ados, pour découvrir la littérature jeunesse à partir de 13 ans (un vendredi soir par période, à la médiathèque).