À partir de 8 ans
Thèmes : Écrans- médias- liberté
Condensé pour pressés : Un chat se promène sur les toits de la ville. Des toits recouverts de fils et d’antennes. Le chat suit ces entremêlements de fils, intrigué, curieux, méfiant, mais très vite il se laisse happer par ce à quoi ils sont reliés au delà des fenêtres : des écrans. Les images absorbent les humains, le chat est pris au piège lui aussi. Peut-il s’en défaire ? Comment aurait-il pu éviter le danger ? Y-a-t-il quelqu’un pour le regarder lui ?
Cécile Roumiguière (Auteure)
Après une maîtrise de lettres modernes sur Jean Vilar et l’éclairage, Cécile Roumiguière plonge dans l’univers du spectacle et dans l’écriture de scénarios pour la scène. Puis elle glisse dans l’écriture de livres, avec des romans et des albums “jeunesse”, qui lui permettent de vivre, chaque fois, cet instant unique : partager une histoire et voir ses mots illustrés. En 2011, avec une formation Fémis d’adaptation de romans pour le cinéma, elle revient à ses premières amours, avec encore des images, en mouvement cette fois. Littérature, cinéma, scène… Quel que soit le domaine, elle aime relever ce défi : tisser entre eux les mots et les images pour aller au plus près des émotions et des sensations.
Carole Chaix (Illustratrice)
Invitée d’honneur de ce 31è Salon
Mélangeant les techniques, les statuts, elle aime concevoir et fabriquer des images dans tous les sens, allant du plat au volume. Et s’il y a bien une chose qui la caractérise, ce sont ces carnets noirs qu’elle remplit de quotidien.
CRITIQUE
Tel le chat, le lecteur avance avec prudence… Les deux premières doubles pages sont intrigantes, elles passent d’une vision globale des toits de la ville aux pattes du chat. Elles installent une curiosité et révèlent la connivence forte entre texte et image. Dès la troisième double page, la vision engagée de Cécile Roumiguière et Carole Chaix est évidente, les deux artistes interpellent : les fils traversent les corps, attachent les mains, noient les corps, retiennent, serrent, empêchent de voir, de parler. Des fils comme des barrières, comme des routes toutes tracées. Une emprise totale sur les corps : des fils comme des prolongements de soi, par les cheveux, par les mains.
L’auteure excelle tout au long de l’album dans le minimalisme : « Croix de métal dirigées vers le ciel. Ennemies. »
Le chat est sauvage, agile, intelligent, mais c’est plus fort que lui, il continue de suivre les fils : « Une lucarne, une trappe ? Un piège… » Les illustrations sont noires, inquiétantes, les oiseaux s’égosillent, sentent la menace. Avec habileté, l’auteure et l’illustratrice nous questionnent sur notre usage de l’écran : écran protection ou écran obstacle ? L’illustratrice se joue des images : devant ou derrière l’écran ? Les écrans sont omniprésents. Cette fiction ressemble à notre réalité : en France, la moyenne des écrans par famille est de 9 ! Avec l’efficacité des réclames en boucle, l’auteure martèle ses mots « musique, numérique, médiatique, frénétique, hypnotique, despotique… ». Quelle angoisse !
Le chat réussit à fuir : « Fauve, animal. Libre, il marche. Loin des écrans, loin des médias ». Les hommes ont des têtes de chat. Ou les chats ont des corps d’hommes ? Si on essayait d’en faire autant, le plus souvent possible.
Ou du moins, puisque la fascination opère sur nos enfants, tentons de donner corps et voix à ces écrans pour ne pas qu’ils nous noient.