Ça pourrait commencer comme une devinette : qu’est-ce qui réunit tous les hommes mais peut les séparer tout autant ?
Le rire est proprement humain, en ce qu’il nous est spécifique et nous distingue de l’animal. Il est donc universel. Pour autant, en fonction de sa culture, de son éducation, de son âge, on ne rit pas tous de la même chose. Universel donc, mais multiforme au-delà d’une apparente évidence, le rire est complexe.
Les premiers déclencheurs du rire chez le tout-petit sont généralement l’étonnement, le plaisir, la surprise. C’est le rire innocent, qui ne se moque pas, qui n’est pas dirigé contre l’autre. En accédant au langage, les possibilités de rire se multiplient, puisqu’au comique de situation se rajoutent les jeux de langue. Et le rire devient aussi parfois cruel. Enfin, il peut aussi prendre une dimension subversive : le dessin de presse dans les pays non-démocratiques en est un bon exemple. En riant, on dénonce, on accuse, on raconte…
Comment concilier cet universel qui nous unit, avec les situations où il nous divise ?
Réagir au monde, c’est commencer à s’interroger sur lui. En ce sens, c’est chercher à l’appréhender (même chez le tout-petit) par une réaction au départ primaire, mais qui souligne quand même qu’il se passe quelque chose (un ressenti : plaisir, surprise, etc.) qui entraîne une réaction (rire). C’est la première base de la construction d’un rapport au monde. En grandissant, c’est notre capacité d’étonnement qui nous pousse à tenter de comprendre ce qui nous entoure, et cet essai n’est pas autre chose qu’une interrogation philosophique. Rire et philosopher, ou deux aspects d’une réflexion sur le monde et sur l’altérité : innocent ou cruel, unificateur et diviseur, arme de subversion…en interrogeant la position de l’être humain dans le monde, le rire est un outil philosophique.
Antonin Louchard, auteur, illustrateur sera l’invité d’honneur de cette 33e édition du salon du livre pour la jeunesse de Beaugency et Saint-Laurent-Nouan, les 13, 14 et 15 avril 2018.